Le papillomavirus humain (HPV), un enjeu majeur de santé publique

Le papillomavirus humain, plus connu sous l’acronyme HPV, touche la quasi-totalité des personnes sexuellement actives au cours de leur vie. En France, on estime que 80% des femmes et des hommes rencontreront le virus à un moment donné (Santé Publique France). Pourtant, les conséquences diffèrent selon la capacité du corps à éliminer le virus : la plupart des infections disparaissent spontanément, mais certaines persistent et peuvent évoluer vers des lésions précancéreuses, voire provoquer des cancers des organes génitaux ou de la gorge.

Selon l’Institut National du Cancer, l’HPV est directement responsable de plus de 6 000 nouveaux cas de cancers chez la femme en France chaque année, dont 3 000 cancers du col de l’utérus, mais aussi des cancers de la vulve, du vagin, de l’anus et de la sphère ORL (INCa).

Comprendre le vaccin contre le papillomavirus

Le vaccin contre le HPV existe depuis les années 2006-2007 en France. Trois vaccins différents ont été ou sont encore disponibles :

  • Gardasil 9 (le plus utilisé aujourd’hui)
  • Gardasil (première génération, désormais moins utilisé)
  • Cervarix
Chacun protège contre différentes souches du virus, mais tous ciblent en priorité les souches 16 et 18, responsables de 70% des cancers du col de l’utérus.

Le protocole standard du vaccin consiste en deux à trois injections, selon l’âge de la première dose.

À qui le vaccin est-il recommandé en France ?

La Haute Autorité de Santé (HAS) et le Ministère de la Santé actualisent régulièrement leurs recommandations. En résumé :

  • Chez les filles et garçons âgés de 11 à 14 ans : Vaccination systématique, prise en charge à 100%.
  • Rattrapage jusqu’à 19 ans inclus : Sans nécessité de justification médicale.
  • Jusqu’à 26 ans dans deux cas :
    • Pour les hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes.
    • Pour les femmes et hommes immunodéprimés ou vivant avec le VIH.
Jusqu’à 19 ans révolus, il s’agit donc d’une vaccination de rattrapage dite « sans conditions ».

Mais qu’en est-il pour les femmes adultes ?

Le vaccin contre le HPV est-il utile après 20, 25 ou 30 ans ?

La question de la vaccination HPV chez la femme adulte revient régulièrement dans les cabinets de médecine générale, notamment pour les femmes de 25, 30, voire 40 ans ou plus. Plusieurs points sont à considérer :

1. Moins d’efficacité après le début de la vie sexuelle

Le vaccin HPV a été conçu pour être administré avant les premières expositions au virus, c’est-à-dire avant le début de la vie sexuelle. En effet, l’efficacité démontrée dans les études cliniques est maximale chez les jeunes filles non exposées : réduction de près de 90% des lésions pré-cancéreuses liées aux souches couvertes par le vaccin (OMS).

Plus l’âge de la vaccination augmente, plus la probabilité d’avoir été exposée à une ou plusieurs des souches du HPV augmente elle aussi. Par conséquent, le vaccin ne protège pas contre une infection déjà en place ou contre les lésions déjà présentes. Mais il peut protéger contre les autres souches HPV non encore attrapées.

2. Existe-t-il un bénéfice chez la femme adulte ?

Des études récentes ont montré que, chez les femmes jusqu’à 26 ans qui n’ont pas encore été vaccinées, il existe encore un bénéfice. D'où les recommandations officielles pour un rattrapage jusqu’à cet âge. Passé 26 ans, la balance bénéfice/risque est moins évidente, car :

  • La majorité des femmes sexuellement actives ont déjà croisé le virus (même si elles ne sont pas infectées à long terme).
  • Le vaccin n’aura d’effet préventif que sur les souches non encore rencontrées.
Des essais cliniques sur des femmes vaccinées entre 24 et 45 ans montrent une réduction modérée, mais non négligeable, du risque de lésions précancéreuses, à condition que la femme ne soit pas déjà porteuse d’une infection avec les souches ciblées (The Lancet, 2009).

3. Pas de recommandation de santé publique après 26 ans (hors situations particulières)

En France : aucune autorité sanitaire ne recommande la vaccination HPV au-delà de 26 ans dans la population générale, en dehors de situations individuelles à discuter avec le médecin (par exemple, une femme immunodéprimée, ou ayant des antécédents de lésions).

Aux États-Unis, le CDC propose une approche au cas par cas pour les femmes de 27 à 45 ans, après discussion avec le médecin sur leur situation individuelle (CDC).

Femmes adultes : situations particulières et discussions personnalisées

Toute décision de vaccination après 26 ans doit se faire en lien avec un professionnel de santé, en tenant compte notamment :

  • De l’histoire sexuelle (nouveau partenaire, vie sexuelle tardive…)
  • De l’état d’immunité (maladie chronique, traitement immunosuppresseur…)
  • Des antécédents de lésions précancéreuses du col ou d’autres atteintes liées au HPV
  • Du souhait personnel et du niveau d’inquiétude
Certaines femmes, par exemple après une séparation ou découverte d’un nouveau partenaire, s’interrogent à nouveau sur leur protection et sur l’intérêt du vaccin à l’âge adulte.

Le dialogue avec le médecin est central : il pourra évaluer le rapport bénéfice/risque et expliquer les options disponibles, en tenant compte des données les plus récentes.

Le dépistage du cancer du col de l’utérus reste essentiel, même vaccinée

Il est capital de rappeler que, vaccinée ou non, le dépistage du cancer du col de l’utérus par frottis (ou test HPV) reste indispensable chez toutes les femmes entre 25 et 65 ans selon les recommandations françaises. Environ 30% des cancers du col sont liés à des souches du HPV non couvertes par le vaccin. Seule une surveillance régulière permet d’identifier à temps des lésions précancéreuses (INCa).

Plus globalement, l’arrivée du vaccin n’exclut jamais la nécessité d’un suivi gynécologique régulier. C’est la complémentarité des stratégies (vaccination précoce, dépistage régulier) qui permet d’espérer voir, à terme, disparaître ce cancer évitable.

Quelles informations concrètes à retenir pour les femmes adultes ?

  • Le vaccin est aussi sûr que bien toléré, même à l’âge adulte (ANSM).
  • Pour la grande majorité des adultes, le bénéfice du vaccin diminue avec l’âge et selon l’exposition préalable au HPV.
  • Le dépistage reste la priorité. Il détecte et permet de traiter précocement les lésions.
  • Un dialogue avec un professionnel de santé est nécessaire pour évaluer l’intérêt du vaccin chez la femme adulte, en particulier après 26 ans.
  • La vaccination chez l’adulte ne remplace pas le dépistage régulier, même si l’on est vaccinée tardivement.

Pourquoi cette question est importante en Seine-Saint-Denis ?

En Seine-Saint-Denis, le taux de couverture vaccinale anti-HPV demeure encore parmi les plus bas de France métropolitaine : en 2020, à peine 18% des jeunes filles de 16 ans étaient complètement vaccinées (CPAM 93), contre plus de 40% en moyenne nationale. Ce retard expose à un risque plus élevé de cancer du col de l’utérus, d’autant que la précarité, la complexité de l’offre de soins et la méconnaissance du vaccin restent des obstacles majeurs.

L’enjeu est double : sensibiliser précocement, mais aussi rattraper les jeunes adultes qui auraient “loupé le coche”. Chez les femmes adultes du territoire, la priorité doit rester le dépistage, mais la question de la vaccination peut, ça et là, trouver un intérêt dans des situations spécifiques.

Des pistes possibles pour l’avenir de la vaccination HPV chez l’adulte ?

Les études se poursuivent sur la vaccination HPV chez les femmes après 30 ou 40 ans. Si, pour l’instant, aucun pays européen ne recommande une vaccination de masse après 26 ans, certains experts appellent à personnaliser encore plus la stratégie, en fonction de l’histoire sexuelle, de l’existence d’un nouveau partenaire ou d’un risque accru. Ainsi, la perspective d’élargir ou d’adapter les recommandations pourra se poser dans les prochaines années.

Enfin, la France a lancé début 2023 une extension de la vaccination à tous les garçons, espérant ainsi réduire globalement la circulation du HPV.

À retenir : informer, dépister, personnaliser

Le vaccin contre le papillomavirus demeure un outil majeur, sûr, et très efficace lorsqu’il est utilisé chez les adolescent·e·s. Pour la femme adulte, plus on avance en âge, moins le bénéfice est important : la pertinence de la vaccination doit donc, au-delà de 26 ans, se discuter au cas par cas avec le professionnel de santé.

En tout état de cause, la priorité pour toutes les femmes à partir de 25 ans en Seine-Saint-Denis reste la prévention : dépistage gynécologique régulier, informations fiables, et lutte contre les tabous pour réduire les cancers liés au HPV.

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