Pourquoi fait-on un frottis ? Retour sur l’objectif du dépistage

Le frottis cervical, ou examen cytologique du col de l’utérus, est un des grands succès de la prévention des cancers. Il permet de repérer à un stade précoce les lésions précancéreuses induites principalement par des infections à papillomavirus humains (HPV), avant qu’elles n’évoluent vers un cancer invasif. Grâce à ce dépistage, la mortalité liée au cancer du col a chuté de près de 50% en France en 30 ans selon Santé Publique France (source).

  • Chaque année, 3 000 nouveaux cas de cancer du col sont détectés en France.
  • Près d’un tiers des décès surviennent chez des femmes âgées de plus de 65 ans.
  • L’infection à HPV peut évoluer à bas bruit, sur plusieurs décennies.

Le dépistage est donc un outil clé, mais doit-il se poursuivre de la même manière toute la vie, ou s’arrêter à partir d’un certain âge ? Les réponses se trouvent dans l’évolution des risques et les recommandations actualisées.

Quelles sont les recommandations actuelles après 50 ans ?

Depuis 2019, le dépistage organisé en France s’appuie sur de nouvelles directives, notamment pour les femmes de plus de 30 ans, avec l’introduction du test HPV en première intention devant le frottis cytologique « classique ».

  • Entre 25 et 29 ans : frottis cytologique tous les 3 ans après deux tests normaux à un an d’intervalle.
  • De 30 à 65 ans : test HPV tous les 5 ans après 2 premiers dépistages négatifs à un an d’intervalle.

Les femmes de 50 ans et plus entrent donc dans la tranche 30-65 ans concernée par le test HPV. Le dépistage reste non seulement utile, mais aussi essentiel, car certaines lésions évoluent lentement, et un nombre significatif de cancers sont découverts après 50 ans (source : Institut National du Cancer, INCa).

Frottis, test HPV : quelles différences après 50 ans ?

  • Frottis cytologique : analyse visuelle de l’aspect des cellules du col de l’utérus pour repérer des anomalies.
  • Test HPV : recherche directe de la présence d’ADN de papillomavirus à risque élevé. C’est un test plus sensible pour prédire le risque de cancer à long terme.

Après 50 ans, la stratégie consiste donc principalement à effectuer un test HPV, généralement tous les 5 ans. Le frottis cytologique n’est fait qu’en seconde intention si le test HPV revient positif, pour affiner le diagnostic.

Existe-t-il des situations où le frottis reste recommandé après 65 ans ?

La recommandation générale est d’arrêter le dépistage après 65 ans, à condition que :

  • Au moins deux tests (frottis ou HPV) consécutifs aient été négatifs sur les dix dernières années.
  • Il n’y ait pas d’antécédent de lésion cervicale précancéreuse ou cancéreuse.

Mais il existe des exceptions :

  • Antécédents d’anomalie du col : surveillance prolongée jusqu’à ce que la régularité du suivi permette d’envisager un arrêt sécurisé.
  • Système immunitaire fragilisé (VIH, traitement immunosuppresseurs…) : le dépistage doit continuer, souvent à un rythme plus rapproché, selon l’avis spécialisé (CDC France).

En cas de doute, il est donc nécessaire d’échanger avec son médecin traitant ou gynécologue, afin d’adapter la surveillance à son propre parcours de santé.

Pourquoi continuer le dépistage après la ménopause ?

La croyance selon laquelle le risque de cancer du col disparaît après la ménopause est fausse. Plusieurs raisons l’expliquent :

  • Les infections à HPV persistent : après 50 ans, le système immunitaire lutte parfois moins efficacement contre le virus, favorisant des lésions tardives.
  • Les anomalies peuvent évoluer lentement : les lésions précancéreuses mettent parfois dix à vingt ans à dégénérer.
  • La vie sexuelle continue après 50 ans : les nouvelles relations, même occasionnelles, exposent à de nouveaux HPV.

L’étude britannique « Million Women Study » (Lancet, 2014) montre ainsi que le risque de développer un cancer du col après 60 ans est multiplié par 2 à 4 chez les femmes sans dépistage régulier après 50 ans, comparé à celles ayant poursuivi une surveillance adéquate.

Pourquoi certaines femmes arrêtent-elles le frottis trop tôt ?

En France, la couverture du dépistage diminue fortement après 55 ans : moins d’1 femme sur 2 a réalisé un frottis ou un test HPV entre 60 et 65 ans (données INCa, 2023). Plusieurs facteurs sont retrouvés :

  1. Méconnaissance des recommandations : beaucoup pensent que le dépistage s’arrête à la ménopause ou à l’arrêt des rapports sexuels réguliers.
  2. Difficulté d’accès aux médecins ou gêne liée à l’examen : la raréfaction des gynécologues, l’éloignement des centres de santé ou un mauvais souvenir de l’examen peuvent être des freins.
  3. Antécédents médicaux : certaines femmes pensent, à tort, que l’ablation de l’utérus (hystérectomie) signifie toujours la fin de la surveillance, alors que le col peut avoir été conservé.

Le cas particulier des femmes après une hystérectomie

L’arrêt définitif du dépistage est possible uniquement en cas d’hystérectomie totale pour pathologie bénigne (ablation complète de l’utérus et du col, hors cancer).

  • Si le col a été conservé, le dépistage doit continuer, selon l’âge et l’historique.
  • En cas d’hystérectomie partielle, seule la surveillance du col reste nécessaire.

Une mauvaise information à ce sujet expose à un risque de diagnostic tardif, même après ablation partielle de l'utérus (source : Haute Autorité de Santé, HAS).

Dépistage et situations à risque accru : quand être particulièrement vigilant ?

  • Femmes immunodéprimées (VIH, transplantation, traitements anti-rejets…)
  • Antécédents de lésions précancéreuses (CIN2/3) ou carcinomes in situ
  • Tabagisme, qui augmente le risque de persistance de l’HPV
  • Histoire de partenaires multiples

Pour ces publics, la surveillance peut être renforcée, sous l’avis d’un spécialiste. Le rythme ou la nature du dépistage s’adaptent alors au risque individuel.

Quels signes doivent alerter après l’arrêt du dépistage ?

Après l’âge recommandé d’arrêt du dépistage, certains symptômes imposent de consulter, même si les derniers tests étaient normaux :

  • Saignements vaginaux après la ménopause
  • Pertes inhabituelles, douleurs pelviennes récurrentes
  • Douleurs lors des rapports sexuels

Ces manifestations sont rarement liées à un cancer, mais nécessitent toujours une évaluation médicale, notamment pour écarter une lésion tardivement apparue.

Questions fréquentes et idées reçues

  • Le vaccin HPV dispense-t-il du dépistage ? Non, même vaccinée, il faut continuer le dépistage selon les préconisations.
  • Des rapports très occasionnels justifient-ils de continuer ? Oui, le risque d’exposition ne disparaît jamais complètement.
  • On m’a dit que le frottis était inutile après 65 ans, est-ce vrai ? Pas dans tous les cas : un suivi est nécessaire en présence de facteurs de risque ou en absence de dépistage antérieur régulier.

Ce qu’il faut retenir pour la santé en Seine-Saint-Denis et ailleurs

Le dépistage du cancer du col de l’utérus, par test HPV principalement après 50 ans, reste une protection efficace, notamment dans un territoire comme la Seine-Saint-Denis où la fréquence du dépistage demeure insuffisante. Après 65 ans, le suivi peut être interrompu sous certaines conditions, mais pas pour toutes : antécédents particuliers, immunodépression, hystérectomie partielle, etc. En cas de doute, il est conseillé d’échanger avec un professionnel de santé, sans hésiter à poser des questions sur l’historique de votre dossier.

Le message central : quel que soit l’âge, le frottis ou le test HPV après 50 ans ne sont pas un examen « en trop », mais bien une assurance supplémentaire pour la santé du futur. L’information, le dialogue et la personnalisation du suivi restent les meilleurs alliés d’une prévention efficace.

Sources :

  • Santé Publique France – Chiffres sur le cancer du col de l’utérus
  • Institut National du Cancer (INCa) – Fiches repères et données de dépistage
  • Haute Autorité de Santé (HAS) – Recommandations sur le dépistage après 50 ans
  • The Lancet – Million Women Study

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